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Odette Nilès

 Odette Lecland-Nilès

En 1941, Odette Lecland a 17 ans. Elle participe à une manifestation contre l’Occupant le 14 juillet 1941, et une nouvelle fois le 13 août 1941. Dix-sept jeunes gens de moins de 20 ans sont arrêtés par la police française : 16 garçons et une fille, Odette. « On nous a gardés quelques jours à la Préfecture de police de Paris. Puis nous avons comparu dans un tribunal allemand, qui siégeait pour la première fois. Cela se passait au ministère de la guerre, il y avait des jardins magnifiques. Le chef d’accusation était : jeunes communistes, ce qui était faux, car il y avait dans cette manifestation des jeunes de toutes origines ».

Chez certains des jeunes la police a trouvé des tracts et une caricature d’Hitler en ... cochon. « La peine de mort a été demandée pour tous. Trois jeunes ont été condamnés à mort et exécutés. Tu embrasseras ma femme, m’a dit l’un d’eux. Je me suis mise à pleurer ». Dix autres jeunes ont été condamnés à de la forteresse et quatre ont été condamnés à la prison. Odette Lecland a été enfermée à au Cherche Midi puis à La Roquette. « Nous étions quatre dans la cellule, dont une prostituée et une trafiquante de drogue (cocaïne) ».

Jackie, Odette, Paulette
Jacqueline Vannie (ép.Fourré) - Odette Lecland (ép ; Nilès), Paulette Bouchoux (ép. Kapliez)

En septembre 1941 Odette Nilès est transférée à Châteaubriant, dans un convoi de 48 femmes. « Nous sommes arrivées de nuit, mais dans la baraque les militants avaient mis un bouquet de fleurs des champs. Et l’un d’eux m’a appelée par mon nom : cela m’a fait chaud au cœur ». C’est ici qu’Odette fait la connaissance de Jacqueline Vannier et Paulette Bouchoux. Et de bien d’autres femmes de valeur comme Marie Kérivel et Marie Bréchet.
Le lendemain matin, Jean-Pierre Timbaud a bien précisé les choses : « Il y a ici 12 femmes et de nombreux hommes internés depuis 8 mois. Il doit y avoir beaucoup de discipline »

« Il y avait, avec nous, des femmes plus âgées, dont les époux avaient été arrêtés et qui étaient séparées de leurs enfants. Nous les jeunes, nous avions plus d’insouciance. Nous sommes organisées pour avoir des paillasses plus propres et une baraque en ordre. Les institutrices et étudiantes parmi nous ont donné des cours de français, anglais, sténo. Nous avions régulièrement des séances de gymnastique, pas par plaisir mais parce qu’il fallait bien s’entretenir. Le soir, l’une de nous faisait la lecture pour les autres ».

Odette Nilès se souvient de la mise à l’écart de la baraque 19, et du départ des 27 Otages. « Quand nous avons été autorisés à sortir des baraques où nous étions bouclés, je me souviens de cette Marseillaise que nous avons hurlée ! »

« Puis les hommes sont partis pour le camp de Voves, enchaînés, les 60 femmes sont restées à Choisel. Un jour nous avons été emmenées à Aincourt, dans un ancien sana. Il y avait là des femmes juives à qui les autorités ont dit de faire venir leurs enfants. Les femmes ont été déportées, les enfants sont restés. Une responsable de la Croix Rouge a pu les faire prendre en charge par un orphelinat : elle les a sauvés »

Ensuite ce fut Gaillon (dans l’Eure), « les paillasses étaient si sales que nous les avons jetées par les fenêtres. Le commandant du camp nous a dit : j’aimerais mieux avoir 600 hommes que ces bonnes femmes ». Puis ce fut un autre camp près de St Pierre des Corps. « Il faisait si froid que nous couchions à trois dans le même lit, de façon à bénéficier de trois couvertures. Une nuit, Jackie a pu s’évader. Nous avions mis un pelochon entre nous : lors de la ronde de nuit le gendarme n’a rien vu. A l’appel du matin nous avons dit qu’elle était aux toilettes, mais il a bien fallu reconnaître plus tard que ... elle n’était plus là » . Cela a valu une punition à Odette, qui a été envoyée dans un camp à Mérignac près de Bordeaux.

Au cours de l’année 44, elle a pu profiter de la débandade générale pour s’échapper et rejoindre les FTP à Bordeaux, avec d’autres femmes. « Quand nous sommes arrivées, on nous a confié ... la vaisselle. Moi j’ai refusé ». Par la suite Odette a pu encadrer les FUJP (Forces Unies de la Jeunesse patriotique). C’est là qu’elle a connu Maurice Nilès, qui était chargé de restructurer le réseau de résistance du Sud-Ouest, et qui devint plus tard son mari. Depuis la mort de Maurice Nilès, Odette est Présidente de l’association Châteaubriant-Voves-Rouillé.

 Guy Môquet, mon amour de jeunesse

Odette Nilès a écrit ses souvenirs des années 1940-1943, pour ses enfants et petits-enfants d’abord, et pour l’Histoire aussi. Son engagement commence à l’âge de 15 ans, en 1940, distribution de tracts, manifestation sur les Grands Boulevards à Paris, et arrestation le 13 août 1941. Interrogatoire, condamnation à mort commuée en peine de prison et puis « l’université » comme elle dit : « ce dépôt de la préfecture où nous sommes restées une dizaine de jours », avec les prostituées, avec les femmes condamnées pour avoir pratiqué des avortements. « Je les écoutais raconter leurs histoires et je n’en croyais pas mes oreilles, leur langage était si cru, si éloigné de ce que j’avais l’habitude d’entendre. Et leur expérience de la vie était si cruelle (…) je me demandais s’il existerait jamais un monde où cette injustice-là aurait disparu ». C’est là aussi qu’Odette découvre l’existence de la drogue et des lesbiennes. Puis ce fut le transfert au camp de Choisel à Châteaubriant, les caisses de bois infestées de vermine, servant de lits.

Odette Nilès raconte la vie au camp, la couture, la gymnastique obligatoire, les cours de sténo et d’anglais dispensés par les autres détenus, et les rendez-vous « à la barrière » pour discuter avec les gars du Camp P1. C’est là qu’Odette et Guy se sont connus. Il jouait de l’harmonica, il écrivait des poèmes … « Je sentais que Guy avait du désir pour moi et cela m’effrayait un peu » écrit-elle, 67 ans plus tard.

L’exécution de Guy puis, pour elle, les camps d’Aincourt, Gaillon, Lalande, Mérignac d’où elle réussit à s’évader en juillet 1944, récit très vivant des pérégrinations d’une jeune fille combative. Un livre passionnant. (Ed. Archipel).


 Une grande dame

C’était une grande dame toute simple ! Grande par la fidélité de son engagement aux idéaux communistes de sa jeunesse, grande par son souci permanent des autres, et notamment des droits des femmes, par ce regard toujours ouvert sur les difficultés du monde, sur les richesses de la solidarité.

Elle a toujours eu à coeur de participer aux cérémonies annuelles en l’honneur de ses camarades fusillés à La Sablière à Châteaubriant, mais aussi de l’ensemble des 50 Otages. Le souvenir, pour elle, n’était pas passéiste. Elle ne se faisait pas gloire d’être la présidente du l’association Châteaubriant-Voves, d’être la dernière survivante du Camp de Choisel, elle n’était ni hautaine, ni distante. Elle était simple, accueillante pour tous et d’abord pour les jeunes à qui elle savait communiquer le souffle de la Résistance, le désir de grandir encore dans la Liberté et la Fraternité.

Odette Nilès nous a quittés ce 27 mai 2023, à l’âge de 100 ans. Comme elle avait tout orgabnisé, elle est décédée au matin de la journée nationale de la Résistance. Son sourire, son souvenir nous resteront. Elle nous lègue un héritage qu’il faudra jour après jour entretenir : le combat contre la peste brune !

Ci-dessous, deux documents désormais introuvables :

Article du journal Libération

Vidéo : Odette Nilès et Guy Môquet : http://www.curiosphere.tv/video-doc...


Plan general du site Resistance

Texte du livre "Telles furent nos jeunes annees", telechargeable ici : http://www.journal-la-mee-2.info/bp/LivreMee.pdf

Plan du livre

Index du livre