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(nb : nous n’avons que quelques parutions du Courrier !)
Le Courrier du 10 mars 1944
Vues par Le Courrier, les nouvelles du front sont toujours positives : « les combats sont devenus particulièrement violents sur le front de l’Est mais les Rouges ont vainement tenté de percer les lignes des armées européennes » « les autorités soviétiques reconnaissent la perte de 15 millions d’hommes depuis le début des hostilités. Le calme règne sur le front d’Italie. Une des plus grandes batailles aériennes de cette guerre vient de se dérouler depuis le Zuyderzee jusqu’à Berlin : 140 avions américains ont été abattus dont 118 bombardiers » (mais on ne sait rien des avions allemands !). « La guerre sur mer est toujours intense ».
Churchill avait annoncé une grande entreprise militaire à la mi-mars. Le Courrier s’inquiète et cite la revue américaine Fortune pour qui « une grande partie des nouvelles relatives à l’invasion imminente (…) ne sont que les accessoires usuels de la guerre des nerfs ».
Il cite aussi L’Observer de Londres : « les débarquements opérés jusqu’à présent sur les côtes réellement défendues par l’ennemi ne peuvent guère que se réaliser très rarement avec succès ».
Le Courrier reprend enfin la lettre d’un lecteur du Times qui dit : « l’invasion constitue notre atout suprême, Et puis, si cet atout venait à rater ... ».
Le Courrier conclut : « on ne paraît pas très enthousiastes chez les Anglo-Américains ».
Pierre Laval, chef du gouvernement, avertit les Français, évoquant les dégradations accompagnant un éventuel débarquement. Mais, dit-il, il y aura pire : « c’est que l’armée allemande ne tolérera pas de désordre chez nous et ceux qui croient qu’on en est encore à ces heures de vie facile où chacun peut dire tout haut ce qu’il pense et agir à sa guise, se trompent (…) J’ai la certitude que les mesures seraient dures et les ripostes cruelles ».
En attendant, la vie continue, des trains sont supprimés, les objets en zinc sont bloqués dans les mains des commerçants car le zinc figure désormais dans la liste des métaux non-ferreux susceptibles d’être mobilisés.
La distribution de pâtes se fait : 25 g contre le ticket DU de février. Les inscriptions pour pommes de terre doivent être renouvelées.
Les faits divers font état de vols de poulets, de linge, d’eau-de-vie et denrées alimentaires.
Le Courrier du 31 mars 1944
« Redoublant d’intensité, les attaques soviétiques sont tenues en échec » : Le Courrier continue à ne délivrer que des nouvelles qui le rassurent, mais à travers lesquelles on sent l’ampleur du combat ! Par exemple, en Italie, les Allemands appliquent « une nouvelle technique anti-chars : l’emploi étendu de troupes spécialisées chassant jusqu’à proximité immédiate des blindés assaillants ». La Luftwaffe a exécuté, la semaine passée, « plusieurs raids violents contre Londres et sa région ». Du 12 au 15 mars, 2548 partisans ont été exterminés en Croatie par les troupes allemandes. Finalement, d’après le Courrier, il n’y a que la France qui souffre : l’aviation anglo-américaine « s’est livrée à de fréquentes incursions sur les territoires occupés de l’Ouest de la France causant des morts parmi la population et de nombreux dégâts ».
Le Courrier alerte à propos de « l’extension croissante du danger bolchevique » en révélant la condamnation à mort et l’exécution de l’ancien ministre de l’Intérieur de Vichy, M. Pucheu.
« Le péril bolchevique n’est plus lointain. Il est sur nous. (…). S’en remettre à l’armée allemande pour le vaincre ne suffit pas. Le devoir impératif de tout européen est d’unir ses efforts à la nation qui sacrifie généreusement le sang de ses enfants pour sauver l’Europe de cette monstruosité judéo-asiatique qui, dans son déferlement, ne laisserait rien subsister des monuments de notre culture et anéantirait jusqu’au dernier vestige de notre civilisation ».
[Ndlr : Après le débarquement allié en Afrique du Nord, Pierre Pucheu avait écrit au Général Giraud pour lui demander de servir sous ses ordres comme capitaine. Sur sa réponse positive, il arrive à Casablanca en mai 1943 ; il est aussitôt placé en résidence surveillée et son procès s’ouvre le 4 mars 1944 devant le tribunal d’armée à Alger. Il est accusé d’avoir livré les otages de Châteaubriant aux Allemands, choisis notamment parmi les membres du Parti communiste qu’il avait, de préférence à d’autres Français, désignés à la répression. En dépit du fait qu’il s’était librement présenté, Pucheu fut condamné à mort et exécuté le 20 mars 1944 : en effet, au cours de ce premier procès de l’épuration, ce fut surtout le régime de Vichy qui fut jugé.]
Le Courrier salue par ailleurs la réorganisation du gouvernement avec Marcel Déat comme Ministre du Travail, Pḧilippe Henriot au Ministère de l’Information et de la Propagande, et Joseph Darnand aux Forces du Maintien de l’ordre. Il signale la sortie du livre « S’ils débarquaient » de Philippe Henriot, reprenant les causeries prononcées au cours de l’année 1943. Enfin le Courrier annonce la création du Prix Drumont célébrant le centenaire du fondateur de l’antisémitisme français.
A Châteaubriant, le nouveau sous-préfet René Dijoud, (arrivé le 8 février 1944) réunit les personnalités de la ville, le 30 mars. D’après le Courrier, elles sont venues nombreuses écouter celui qui leur parle de « cet instrument de libération qu’est la Charte du Travail » [proposée par Marcel Déat] avec laquelle patrons et ouvriers « peuvent opposer un barrage inébranlable à la marée bolcheviste ». « Il appelle ensuite l’attention de l’auditoire sur les dangers graves pour la vie du pays, que présentent les éléments, intérieurs ou extérieurs, qui travaillent à l’instauration du bolchevisme ».
[Ndlr : René Dijoud est resté sous-préfet de Châteaubriant jusqu’en septembre 1944. Le 5 août 1944, dans un discours tenu au lendemain de la libération de Châteaubriant, il montre « l’époque actuelle pleine d’allégresse grâce au mouvement spontané qui s’est manifesté après des années vécues sous la botte et le drapeau français, flottant enfin sur la mairie à côté de celui des Alliés ». Son discours aurait donc changé en six mois ! On retrouve René Dijoud ensuite dans la Sarthe où le Préfet le propose pour une distinction honorifique en novembre 1945 en indiquant que René Dijoud aurait pris contact et eu « les meilleures relations avec les comités cantonaux de la Libération et aurait conjointement procédé à une épuration rapide et judicieuse de son arrondissement »].
Mais revenons au Courrier : ce 31 mars 1944, il publie un avis du Militaerbefehlshaber : « toute personne soignant des blessures causées par des armes à feu ou des explosifs est tenue de déclarer, sans délai, à la Feldkommandantur ou à la Kreiskommandantur, le nom et le lieu de séjour du blessé ».
Au Conseil Municipal de Châteaubriant qui s’est réuni le 27 mars, le maire a prononcé l’éloge funèbre d’Ernest Bréant et proposé de donner son nom à la place de l’hôtel de ville, ce qui a été accepté.
(Nous n’avons aucun numéro d’avril 1944)
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P.-S.
NB : Les extraits du « Courrier » publiés ci-dessus complètent le livre « Telles furent nos jeunes années » (300 pages) racontant la vie à Châteaubriant, la Résistance, la Déportation et la Libération. Disponible encore dans les librairies de Châteaubriant ou téléchargeable ici : http://www.journal-la-mee.fr/IMG/pdf/LivreMee.pdf