La Sablière 2008 : la jeunesse de la Résistance
67e anniversaire de la fusillade de Châteaubriant, Dimanche 19 octobre 2008
(voir texte en bas de cette page)
Une voix pure, a capella, s’élève comme une plainte sur une adaptation du poème écrit par Paul Verlaine en prison : « Dis, qu’ont-ils fait de toi et de ta jeunesse » Puis on entend des bombardements lointains et de plus en plus présents. Explosions d’obus et tirs. Champ de bataille 14/18. Après 30 à 40 secondes une musique (Rock) vient se mêler aux bruitages. Une machine diffuse de la fumée sur scène. Des personnages apparaissent en avant-scène, comme sortis d’un autre monde. Il s’agit de soldats de 1918. Ils sont trois, un peu hagards, leur barda sur le dos. Ils regardent au lointain, repartent et disparaissent. Les bruitages de guerre s’effacent, seule la musique continue en évoluant sur une sorte de danse des années 20. « Années folles » ? Une voix chantée (Mistinguett) « Mon homme ». Une voix d’homme lui répond « Dans la vie faut pas s’en faire », puis la femme reprend « J’ai deux amours » de Joséphine Baker et encore l’homme « La plus bath des javas ».
Pendant cette évocation chantée, des couples années 25/30 traversent l’espace en esquissant des pas de danse. Puis des ouvriers, des mineurs rentrent du travail. Rires des bourgeois qui se moquent d’eux. Regards sombres des ouvriers fatigués, la musette sur l’épaule. Des enfants mendient ou jouent dans le caniveau.
On entend aussi des bruits de bottes et la voix de Mussolini puis brusquement celle d’Hitler. Tout se fige alors en image arrêtée quelques secondes. Le tableau disparaît. Tout le monde sort. Des narrateurs s’avancent.
Deux régisseurs amènent le cadre d’un tableau derrière lequel vient prendre place en image un groupe de jeunes garçons et filles.
Voix 1 d’adulte : 1919 – 1939 ! 20 ans ! L’âge d’une jeunesse !
Au fur et à mesure de leurs interventions, les jeunes vont sortir du tableau. Des voix de jeunes s’alternent .
Jeune : Nous sommes les enfants des survivants de la « Der des der ». A peine 20 ans et nous serons les Combattants Résistants de la seconde guerre mondiale.
Elevés dans la mémoire de ce que fut l’horreur des tranchées, nos jeunes yeux, immensément ouverts, sont témoins de la crise issue du crash de 1929.
Nos oreilles entendent chuchoter et bruire l’arrivée de nouvelles menaces. En Italie avec Mussolini ! En Allemagne…avec l’irrésistible ascension du parti National Socialiste.
On entend la voix d’Hitler éructant quelques extraits de Mein Kampf. « La vérité s’est faite jour dans mon esprit cette nuit là où j’ai compris en pleurant jusqu’au matin que le peuple juif travaillait délibérément à la ruine de l’Europe, et de l’Allemagne en particulier ». Jeune (chuchoté) : HITLER ! Hitler, pas encore chancelier et déjà sa voix parvient jusqu’à nous à travers les extraits de "Mein Kampf" diffusés dans certains journaux.
Voix d’Hitler : « Notre objectif primordial est d’écraser la France. Il faut rassembler d’abord toute notre énergie contre ce peuple qui nous hait. Dans l’anéantissement de la France, l’Allemagne voit le moyen de donner à notre peuple, sur un autre théâtre, toute l’extension dont il est capable. »
D’autres adolescents arrivent.
Voix de jeunes : Nos années d’enfance passent vite et voilà que contre la jeune République d’Espagne, le fascisme déploie ses ailes brunes. Madrid ! Guernica ! L’ombre plane très haut dans le ciel d’Europe. Autriche ! Hongrie ! Bulgarie ! Portugal ! Adolescents, adolescentes de ces temps de menace et de luttes, il eut fallu être aveugles et sourds. ou bien inconscients et inconscientes pour ne pas engager toute notre énergie… pour ne pas y mettre tout notre courage, dans le combat pour la liberté.
1933 ! 1934 ! 1935 ! Manifestations et marches de soutien.
1936 ! Grèves ! Luttes ! Et victoire du Front Populaire, un répit, un rêve, on espère…
1937 ! Collectes pour l’Espagne, révoltes contre la politique de « non-intervention ».
1938 ! 1939 ! Manifestations et grèves et luttes dans la légalité ou la clandestinité. Apprentissage du combat… Il est déjà loin le temps des premières armes. Nous savions que la liberté avait un prix. Mais nous n’imaginions pas les longues errances et la déportation.
Nous savions que nous engagions nos jeunes vies.
Mais nous ne soupçonnions pas la haine, la torture
et les froides exécutions.
Nous avions pour tout bagage notre révolte,
notre soif de justice. notre insatiable soif de liberté.
Pour tout bagage nous avions notre jeunesse et un seul mot cousu au quotidien de notre combat. « Résistance »
« Résistance », comme un étendard planté au cœur.
« Résistance », une conjuration de toute peur.
« Résistance », la seule issue pour espérer notre jeunesse.
« Le temps des cerises » de Jean Baptiste CLEMENT
Ils nous avaient volé le goût du pain et du miel
Ils nous avaient volé la beauté des choses
Ils voulaient nous voler la pitié et la tendresse
Nous étions durs comme le granit.
Les adolescents sortent après le chant. Des adultes prennent place dans le grand cadre.
Voix Adulte : Fernand ? Fernand DEVAUX, 1933 ! Rappelle-toi, rappelle-nous ici, la marche de la faim à St Denis.
Fernand : 1933 ! J’ai onze ans ! Je suis né le 3 janvier 1922 à Guingamp. St Denis ce jour-là de 33 ? Oui je me rappelle…Chômeurs, gaziers, cheminots, terrassiers, maçons, émigrés espagnols, italiens, polonais marchent et manifestent pour pouvoir manger. Impressionnante, cette foule énorme de travailleurs ? Oui, pour moi, la naissance de mon engagement.
Voix Adulte : (elle interpelle une autre figure du tableau). Jacky ? Jacqueline FOURRE ! Toi, tu viens d’Ivry !
Jacky : De 23 à 34, j’y ai passé ma petite enfance. Au début papa n’était pas communiste, mais c’était tout comme… A deux ans j’allais aux manifestations sur les épaules de papa. A côté de ça, ma mère était « enfant de Marie » !
Voix d’adulte : Gisèle GUILLEMOT 24 février 1922, tu viens au monde à Caen ! Fille d’une mère normande et d’un père italien, c’est ça ?
Gisèle : A Mondeville, à 4 km de Caen. Dans le village, on m’appelait « la Ritale ». Mon père l’Italien de passage a rompu ses fiançailles et laissé tomber ma mère enceinte.
Voix : C’est de là que vient ta révolte ?
Gisèle : Peut-être ! Mais surtout des inégalités sociales que j’ai vues toute mon enfance ! Mon beau-père était comptable à la Société Métallurgique des Chantiers Navals : La « SMCN » de Caen. 6000 ouvriers.
Voix : Vous viviez dans l’usine ?
Gisèle : Oui, avec les ouvriers ! J’étais toujours dans la rue ! J’ai eu une chance inouïe. A 9 ans, j’ai été flanquée à la porte de l’école de l’usine pour n’avoir pas voulu me lever quand un chef est rentré. [Voix : Déjà rebelle, Gisèle !] . Je me suis retrouvée à l’école publique de Colombel avec une directrice « Freinet ». C’est ça qui m’a construite.
Voix : Et toi Jacky ? Quelle rencontre ?
Jacky : Moi, j’ai quitté Ivry à 11 ans pour Orléans. La rencontre c’est Paul Vaillant Couturier, venu faire un meeting en 1934…et après Maurice Thorez aussi. J’adhère aux Jeunesses Communistes à 13 ans. Après j’ai été de tous les combats.
Voix : Jean FUMOLEAU… le gamin de Clichy, fils de maçon, copain de Guy MOQUET. Quel chemin de Résistance as-tu fait ?
Jean : en 36, j’ai 14 ans. Je vois le film de Jean Renoir « La Marseillaise » au cinéma. Ça, c’est grâce au Front Populaire. [Voix : La prise de conscience ?] Oui ! Très forte ! Après il y a eu très vite les actions… Ça s’est fait naturellement.J’ai distribué des tracts pour le mouvement « Amsterdam Pleyel », un comité d’intellectuels français a organisé un congrès antifasciste européen, au-delà de toute appartenance de parti.
Fernand : Dans le même temps, des antifascistes allemands qui ont fui l’Allemagne, sont recueillis dans différentes familles à St Denis. [Voix : C’est la solidarité !] . Oui. Chez nous on invite un jeune à venir manger. On ne parle pas la langue. On se comprend quand même. Ce gars va s’engager dans les Brigades Internationales en Espagne.
Voix : Rejoins-nous André, André ROUAULT… Rappelle-nous tes 17 années de vie !
André : J’ai vécu, j’ai combattu pour la fraternité et l’amour entre les hommes. J’ai rêvé d’une humanité meilleure. Je ne me rappelle pas avoir eu peur (temps)…peut-être devant le peloton d’exécution au champ de tir du Bêle à Nantes ce 29 janvier 43.
[Voix : Tu avais 17 ans ! ] . Je n’étais ni bandit, ni assassin, seulement Patriote !
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Voix : Vous avez dit 17 ans ? … Alors approche à ton tour « Guy » !, Toi l’incarnation de « l’adolescente Résistance »… Le grand frère à jamais de toutes les « jeunesses » de France : Guy Môquet ! Tu n’as pas vu les policiers en civil dans le métro ! Tu ne les as pas vus non plus, au guichet de la gare de l’Est, ce dimanche 13 octobre 1940 ! Pourquoi faut-il que tu aies bourré tes poches de ce poème que tu viens de composer ?
Guy Moquet : Parce que je veux le vendre sur le marché à Saint Ouen ! [Poème écrit à l’adresse de tes trois copains arrêtés quelques jours plus tôt …]. Les sous récupérés, sûrement, auraient pu leur servir !
Voix : Mais sur ton cahier d’écolier, les mots…tombés dans les mains des policiers vont te condamner à la mort prochaine, toi, l’étudiant du lycée Carnot !
Poème de Guy Môquet
Parmi ceux qui sont en prison
Se trouvent nos trois camarades
Berselli, Planquette et Simon
Qui vont passer des jours maussades
Vous êtes tous trois enfermés
Mais patience prenez courage
Vous serez bientôt libérés
Par tous vos frères d’esclavage
Ils se sont sacrifiés pour nous
Par leur action libératrice
Alors donnez-leur quelques sous
C’est le moindre des sacrifices.
Voix : En 1936, à 17 ans également, c’est toi Josette COTIAS qui es responsable des « Jeunes Filles de France ».
Josette : Essentiellement pour l’aide à l’Espagne Républicaine oui. L’Espagne où je vais me rendre en délégation en 1937 accompagnée de Rose BLANC et de Jeannette VERMEERSCH. Nous trouvons un pays ravagé par l’attaque de Franco venu du Maroc et la guerre civile qui y règne.
Voix : Henri CROTTI, immigré Italien, Résistant. Matricule 100…Ricordi - Lei ?
Henri : Anti-Mussoliniens, antifascistes Italiens, le petit café de mes parents, rue Curial, était leur repère. Tous y venaient. Contre les assauts fascistes envers la République, je manifeste dès 1934 ! J’ai à peine 18 ans.
Fernand : Je me rappelle aussi, j’avais 13 ans. Il arrive dans notre classe de certificat d’étude, un jeune allemand : Edmund SCHNEILLER… et puis on apprend que son père a été décapité à la hache…C’est en 1935 !
Voix : Matricule 31660 ! Madeleine ODRU, sors toi aussi du passé… Parle-nous de ta jeunesse dans cette Résistance.
Madeleine : J’ai perdu ma mère très jeune. Mon père était socialiste. Ma sœur, mon frère et moi étions très ouverts à la politique. On écoutait notre père. Mais lorsque le Parti Socialiste a pris position contre l’intervention en Espagne, nous les enfants, ça nous a énormément choqués.
Voix 1 : « C’est parce que vous n’aviez pas connu la guerre ! »
Madeleine : Oui, c’était le grand argument de notre père. Il était persuadé que l’intervention en Espagne pourrait entraîner les conditions d’une 2e guerre mondiale ... (temps) Après ? Bon, ben on l’a eue, la guerre !
Voix 4 : Simone ! Simone MILLOT, c’est ton tour de raconter… la Résistance à Nantes.
Simone : Pour moi, le signal a été 1939 et l’annonce du décret d’illégalité du Parti Communiste… A l’arrivée des Allemands, on a commencé à faire des tracts pour expliquer…On les glissait dans les boîtes aux lettres ou on les accrochait sur les arbres. Au début quand on se faisait prendre, c’était pas trop grave. Les Allemands nous emmenaient à la Kommandantur et nous faisaient cirer leurs bottes. Plus tard, on risquera la peine de mort.
Voix : Maurice ! Maurice PICONNIER, né le 3 septembre 1919 à St Brévin-les-Pins. Toi, comment entres-tu dans la lutte ?
Maurice P. : Parce que je crois au combat contre l’injustice et contre le fascisme. Je m’inscris aux Jeunesses Communistes en juin 35. Je n’ai pas 16 ans. [Voix : Et ton combat t’amènera à Choisel, ici, prisonnier à Châteaubriant !]. Oui, je suis présent, ce 22 octobre 41 lorsque les 27 partent vers la fusillade. Ils ont combattu jusqu’au dernier souffle parce qu’ils avaient décidé comment ils allaient mourir, pour que leur mort serve à quelque chose.
Voix : Et toi, l’autre Maurice. Maurice NILES, né aussi en 1919. Pionnier des Jeunes Amis du Secours Rouge, enfant d’Aulnay-sous-Bois. Que gardes-tu au cœur de tes jeunes années ?
Maurice N. : De toute cette période, je garde… je garde un très grand sentiment d’exaltation et la conviction que la Résistance n’a été possible que parce que nous étions déjà trempés par toutes les luttes des années trente.[Tu as toujours gardé confiance ?] - Maurice Nilès : Dès 1940…alors que Goebbels annonçait le Reich pour 1000 ans, nous restions persuadés que nous allions gagner, oui ! Une confiance inébranlable dans l’issue victorieuse du combat de la Résistance.
Voix : Il est dit que c’est la jeunesse qui la première a commencé le combat de la Résistance. Odette NILES, Odette LECLAND de ton nom de jeune fille. Tu as 17 ans lorsqu’ils te prennent et te condamnent à mort ce 13 août 41… Encore une fois redis-nous.
Odette : En 39, j’ai 15 ans lorsque Claudine CHOMAT, une dirigeante des Jeunes Filles de France avec Josette COTIAS vient me demander de reconstituer les Jeunesses Communistes. Aidée de Marcelle JORISSEN, Solange BOUTARIE, Elvire CANESSA et Fernande PENA on re-contacte les jeunes qui composaient l’U.J.F.F., les Jeunesses Communistes et les cadres de la JC.
Voix : Tout le monde est revenu ?
Odette : Non, on a eu pas mal de refus. Les jeunes eux étaient d’accord…mais les parents n’avaient pas confiance. On a fait des inscriptions sur les murs et on a distribué des tracts clandestins pour essayer de mobiliser les jeunes.
Voix : Et c’est là que vous vous êtes fait prendre.
Odette : Oui, au métro Richelieu Drouot. On était 17 jeunes. Jugés en Cour Martiale, 3 de mes camarades ont été condamnés à mort. RAPINAT de Pavillon-sous-Bois, André SIGONNEY et Raymond JUSTICE d’Aulnay. Ils sont fusillés ensemble le 25 août à la prison du Cherche Midi. J’entends toujours la voix d’André.
André SIGONNEY : (adolescent)
Chère maman, cher Jean,
Cette lettre que vous recevez est la dernière qui sera écrite de ma main, car demain matin je serai passé par les armes. J’ai été condamné à mort par les autorités allemandes, ainsi que Raymond et d’autres car la police française nous a remis entre leurs mains.
J’espère que vous aurez beaucoup de courage quand vous apprendrez cette nouvelle, il le faut, puisque nous, nous en avons beaucoup. Nous allons mourir comme les jeunes Français et les ouvriers savent mourir c’est à dire en braves et avec courage en pensant que notre sacrifice ne sera pas vain.
La mort ne nous a jamais fait peur, ce n’est pas aujourd’hui que ça va changer. Je vous embrasse fort.
Voix : La liste des jeunes qui vont payer du prix de leur vie est longue…terriblement longue. Pour ne prendre qu’un département, celui de la Loire Inférieure, aujourd’hui la Loire-Atlantique, on recense 115 jeunes de 15 à 25 ans fusillés ou exécutés de 1941 à 1945.
Voix : Et toujours pour cette « Loire Inférieure » entre 1940 et 1945, 199 jeunes de 15 à 25 ans mourront en déportation.
Passage musical instrumental grave puis la musique remonte le temps pour évoquer 36.
« Où est-il donc ? » Chanson de FREHEL, Paroles : A.Decaye, Lucien Carol – Musique : Vincent Scotto
Un bal se crée sous forme de tableau vivant. Après quelques minutes, un photographe entre et fige l’image. La musique s’arrête.
Voix : Il y a une image d’Epinal de 1936 et du Front Populaire : le bal dans l’usine occupée. Ou encore : la joie avec les fanfares, enfants, femmes et hommes défilant et riant aux côtés de l’harmonie municipale. Ce sont des images d’Epinal, oui mais voilà, elle sont vraies !
La musique (accordéon) se remet en route et les personnages en mouvement. Au ralenti, des jeunes sortent de ce tableau vivant.
Poème de Gisèle GUILLEMOT
On a dansé cette année là
Année de toutes les conquêtes
Sur la plage ils étaient venus
Les Parisiens, les gens du Nord
Ceux de Moselle et du Loiret
Ils contemplaient le cœur en fête
La mer qu’ils n’avaient jamais vue.
On a dansé cette année là
On avait tort, on aurait pas dû
Années de lâches démissions
A croire qu’on perdait la raison
Sur la plage ceux qui étaient venus
Pensaient à Prague déchirée
Et à Madrid écartelée.
On a dansé cette année là
Drôle de danse sur les routes de France
Année de toutes les défaites
Sur la plage ceux qui étaient là
Tentaient de fuir face à la mer
Une pluie de feu et de fer.
Jeune (continuant le poème) :
Ils ont dansé ces années là,
dans nos villages et nos stations.
Années de sales compromissions.
Sur la plage ceux qui étaient là,
tapis comme de sinistres rats
au fond d’inutiles bunkers,
savaient qu’ils n’en sortiraient pas.
Jeune : Nous danserons l’année prochaine
nos quatorze juillet retrouvés.
Sur la plage nous serons tous là, les Parisiens,
les gens du Nord, ceux de Moselle et du Loiret,
devant la mer enfin calmée,
tenterons de panser nos plaies.
Sur la fin du poème, petit à petit, les personnages ont quitté la scène. Puis la musique s’éloigne à son tour et disparaît.
Voix : 1937 ! La jeunesse militante se mobilise pour l’Espagne. Lait, argent, vêtements sont collectés. Les temps deviennent difficiles. Au cœur des problèmes posés, ceux de la Paix et de la Guerre.
Voix : 1938 ! La situation se dégrade ! Dans les usines, le patronat veut reprendre ses droits. Grèves et revendications syndicales s’enchaînent.
Fernand : Moi, Fernand DEVAUX, je travaille chez HOTCHKISS, comme tôlier. On fabrique des camions, des mitrailleuses, des chars pour l’armée. Je diffuse « la Vie Ouvrière », je participe à la grève du 30 novembre 38 pour les revendications syndicales et contre « les accords », les odieux « accords de Munich » !
Maurice Nilès : (qui arrive à son tour) Moi je me souviens comme beaucoup d’autres de ce fameux voyage de Chamberlain, premier ministre britannique accompagné de Daladier, premier ministre français, se rendant en Allemagne pour discuter avec Hitler afin de livrer aux nazis, les territoires Sudètes de Tchécoslovaquie.
Voix : Et toi Maurice, tu étais au Bourget pour les accueillir à leur retour !
Maurice : Oui. J’ai fait partie de ces jeunes qui ont hurlé à leur descente de l’avion, que Munich ce n’était pas, ce ne pouvait pas être la paix ! Munich c’était la guerre et on l’a vu ensuite.
Fernand : Mais Daladier est ovationné par la population. Les Français approuvent les « accords de Munich » ! C’est le début de la catastrophe.
Voix : « Vous aviez le choix entre le déshonneur et la guerre ! Vous avez le déshonneur … et vous aurez la guerre ! ».
Voix 8 : Cette voix terrible qui s’élève pour annoncer avec tant de clairvoyance le cataclysme à venir, est celle de Winston Churchill. L’Angleterre, la France et l’URSS engagent toutefois des discussions pour la signature d’un pacte d’Assistance mutuelle.
Maurice : Hélas, la Pologne refuse le passage des troupes soviétiques sur son territoire. C’est l’échec ! Et pire, les Russes signent « un pacte de non agression » avec l’Allemagne.
Fernand : Et vous connaissez la suite. En France, la réaction est immédiate, le décret Daladier dissout le Parti Communiste. On est fin août 1939. Nous devenons des illégaux ! Des clandestins ! En 1940, la CGT, les Francs- Maçons, et toutes les Organisations démocratiques seront à leur tour interdites par le Maréchal Pétain.
Des jeunes et des adultes traversent la scène en courant. La police française se positionne dans l’espace et surveille tout déplacement. Des ménagères se font arrêter, des jeunes gens à vélo… Une musique sombre accompagne cette scène.
Madeleine : Y’avait l’Allemagne, l’Italie et maintenant l’Espagne fasciste. Nous les jeunes, on n’était pas tranquilles sur l’avenir. On était anxieux et même terrifiés à l’idée d’aller faire la guerre.
[Voix : Mais toi, Madeleine ODRU, jeune fille tu n’étais pas mobilisable !].
Madeleine : Moi non ! Mais mon père, mes copains, oui ! On était toute une bande de jeunes gens. Et puis l’inévitable est arrivé. L’Allemagne envahit la Pologne et le 3 septembre 39, la France déclare la guerre.
Voix 7 : Josette COTIAS ! Tu arrives essoufflée ! Que veux-tu ajouter ?
Josette : Jusqu’en juin 1940 c’est la drôle de guerre. Avec Danielle CASANOVA, puis Victor MICHAUT et Georges TERNET on produit 4 numéros d’un journal « Les liens du soldat » que je vais porter aux cadres mobilisés sur le front.
Tous se figent comme si le temps se suspendait. Entrent en scène un père (Jean-Pierre Timbaud) et sa fillette de 11 ans (Jacqueline). Il la prend sur ses genoux. Une musique douce est jouée en fond.
J-Pierre Timbaud : Ecoute ma chérie, écoute mon trésor … Ton papa est un honnête homme, mais peut être un jour on viendra m’arrêter… Ma petite Jacqueline, si un jour tu me vois en prison, tu seras fière de moi ! Tu me promets ?
Jacqueline : Oui papa ! (elle se lève et s’avance) J’étais à l’école de Torcy lorsque Papa a été arrêté le 18 octobre 1940. Les gendarmes sont venus à la maison chercher ses vêtements. Après, à l’école, il y avait des parents qui interdisaient à leurs enfants de jouer avec moi. J’étais : " la fille à TIMBAUD !".
Entrent deux gendarmes. La musique cesse.
– Le gendarme : Toi, viens voir ! Tu t’appelles Jacqueline TIMBAUD ? C’est ça ?
– Jacqueline : Oui !
– Le gendarme : Regarde ces photos, tu les reconnais ? Ce sont des copains à ton père ! Hein ?
– Jacqueline : Non … Je ne connais pas !
– Le gendarme : Allons, fais un effort… Tu les as déjà vus au Syndicat des Métaux avec ton papa.
– Jacqueline : Je vous dis que je ne les connais pas ! Je ne sais rien !
– Le gendarme 1 : (après hésitation) Bon, allez, file !
Les gendarmes sortent. Le tableau figé reprend vie.
Fernand : Fin 39, la police vient à la maison. Ils perquisitionnent. Ils ne trouvent rien mais ils emportent des livres. J’ai caché les tracts dans la musette militaire de mon frère.
Voix : Toujours la drôle de guerre ! Rien ne semble bouger et pourtant ! Odette : Il y a des octrois partout, pour passer d’une commune à l’autre.
– Un gendarme : (à une jeune fille qui passe en vélo) Qu’est-ce que tu as dans ce panier ?
– La jeune fille : Des tracts communistes !
– Le gendarme : Tu ne devrais pas jouer avec ça ! Ça peut être dangereux !
– La jeune fille : (elle repart) Excusez-moi !
– Odette : J’avais vraiment des tracts dans mon panier.
Jacky : Oui Odette, mais tout le monde n’a pas eu cette chance ! Odette : Tu penses à SCOLARI ?
Jacky : Oui, à Rino. Rino SCOLARI. Pour lui, la Résistance avait commencé bien avant en Italie. Gamin, il avait été enrôlé dans les Babylas (les mômes de Mussolini). Il s’était enfui. Réfugié chez une tante à Puteau ! En 39, il a 19 ans. Il participe à la création de la Résistance dans la région parisienne. Ça se passe dans le bois de Vincennes. Mais il se fait prendre dès début 40, au sortir d’une nuit d’amour. Ah c’qu’il était beau gosse ! Il se retrouve bientôt à Choisel, dans la baraque de son copain Guy MOQUET.
Odette : Plus que copain ! Frangin ! Ils étaient 4, unis comme les doigts de la main. Rino SCOLARI, Roger SEMAT, Maurice SIMONDIN et Guy MOQUET. Dans la baraque 10 et dans le camp ils partageront tout. Jusqu’aux derniers instants !
Brusquement, alors que la scène s’est vidée des passants et des gendarmes, un immense drapeau nazi du IIIe Reich se déroule et ferme la moitié de l’espace. Aussitôt six soldats allemands viennent prendre position face au public de chaque côté de l’étendard. Musique militaire de l’armée allemande. Puis les soldats se tournent vers le fond de la scène. Les personnages qui entrent, viennent parler dans leur dos, face au public.
Voix d’hommes et de femmes :
J’ai vu la débâcle.
J’ai vu les hommes, les femmes, les enfants avec leurs baluchons,
avec des brouettes ou des charrettes partir en exode.
J’ai vu mon entreprise déménager en province !
J’ai vu ma mère pleurer et partir en Bretagne !
J’ai vu la déroute de l’armée française qui se repliait !
J’ai vu un soldat casser son fusil sur le bord du trottoir !
J’ai vu ! Oui, j’ai vu l’arrivée des troupes allemandes à Paris !
Sur les Champs-Élysées, une véritable parade !
La gorge nouée j’ai suffoqué !
Je n’ai pas supporté.
Qu’est-ce qu’on peut faire face à cette puissance ?
Faire quelque chose, oui ! Il faut faire quelque chose !
On ne peut pas supporter d’être ainsi sous l’occupation.
Vivre en régime fasciste ! C’est notre lot ? C’est effrayant !
Partir en Angleterre ? Pour nous, ce n’est pas la solution.
Trouver des contacts. Recréer des liens.
Reconstituer l’organisation ! Se parler !
Echanger nos points de vue.
Les tracts ! Distribuer des tracts ….
Dans le public, des tracts sont distribués clandestinement.
Redonner de l’espoir.
Redonner de la dignité.
Faire des actions spectaculaires. Par exemple distribuer des tracts
sur les marchés en plein jour à bicyclette.
Pédaler plus vite que les policiers français.
Se méfier des Allemands mais aussi des Français qui dénoncent.
On constitue des groupes de rues petit à petit…
On réussit à s’armer.
Moi, mon père m’a donné son revolver.
Partout, dans toutes les régions, dans toutes les villes
se créent les O.S., les Organisations Spéciales.
Elles donneront bientôt naissance aux F.T.P.
Notre mission principale : désorganiser les Allemands.
Essayer de soulever la population française contre l’occupant.
Recréer le sentiment d’honneur et de révolte.
Pour ça : Informer ! Oui, informer ! Informer ! Informer !
Dénoncer la police française qui travaille
main dans la main avec les Allemands.
Chaque jour nous en donne la preuve !
Depuis quelques minutes des gendarmes sont venus s’intercaler avec les soldats allemands.
Femme : J’ai volé des bicyclettes aux flics à l’intérieur des commissariats. J’ai saboté des voitures allemandes. Du sucre dans l’essence… Bourré de l’ail dans les carburateurs… J’ai mis le feu à un camion allemand avec de l’essence et du celluloïd…
La musique allemande qui n’a cessé de monter progressivement, s’arrête brusquement.
Mais il y a la riposte. les arrestations. les délations.
Dans notre groupe, plusieurs de nos camarades tombent.
Ce jour-là, c’est un étudiant en médecine qui se fait arrêter.
La jeune fiancée : (elle arrive en urgence) Je suis sa fiancée. J’habite un appartement de l’autre côté de la rue. J’ai vu les agents de police l’arrêter. Il y avait un type qui les accompagnait. Ce matin, j’ai revu ce gars dans la rue. Il repérait des numéros. Je l’ai filé. Il est entré à la Gestapo ! Il faut vous méfier !
Madeleine : (à la jeune fille) Je cours le dire à André PICANT, mon chef de réseau.
André Picant : « Il faut le descendre !... Et tu t’en charges ! »
Madeleine : Alors je m’en charge, avec un camarade. On le file et puis on le descend (silence). Mais tu vois quand on l’a tué, on a trouvé sur lui un carnet avec toute la liste de ceux qu’il allait faire arrêter. Et il y avait même les sommes devant les noms…Les sommes qu’on lui payait !
« Douce France » de Charles TRENET
Voix : Enrayer l’abattement général. Appeler à ne pas baisser les bras, qu’il s’agisse de cartes d’alimentation ou des difficultés de toutes sortes auxquelles se heurtent les ménagères. Au fur et à mesure des actions, d’autres nous rejoignent.
Josette : A l’exode je parcours 1500 kilomètres à vélo : Paris - Bordeaux – Toulouse – Limoges –Toulouse à nouveau et puis Lyon où je rejoins les responsables de la zone sud pour reconstruire le Parti Communiste.
Voix : Josette COTIAS, les faux papiers d’identité. C’est ta mission ? Josette : Oui et puis la liaison zone sud et zone nord. Avec Claudine, en février 41, on échappe aux rafles et au coup de filet de Lyon parce que nous étions en mission. En août 41, je pars pour la région nord comme responsable des Comités Féminins.
Voix : Et jamais ils ne te piègeront ?
Josette : Hélas si, le 11 novembre 42 à Lille après plusieurs fautes de sécurité des camarades. On m’enferme pour 22 mois de prison cellulaire. J’ai 23 ans !
Un homme entre et interpelle une femme.
L’agent de liaison : Mme Millot ?
Simone : Simone Millot, oui !
L’agent de liaison : Nous avons su pour votre mari. Il était pourtant très vigilant !
Simone : Oui, la peur n’évite pas le danger ! Mais c’est ainsi !
L’agent de liaison : Vos trois petites filles sont toujours avec vous ?
Simone : Bien sûr, où voulez-vous qu’elles aillent ?
L’agent de liaison : Tenez !
Simone : L’homme me tend un petit bout de papier, une carte illustrée déchirée. C’est un PASS. Il faut que je vérifie avec le morceau que j’ai. Méfiance ! « Excusez-moi, j’ai du lait sur le feu, je reviens. » - _ Je me précipite à la cuisine. Je vérifie. Ça colle. « Bon ça va, alors de quoi s’agit-il ? »
L’agent de liaison : Mon nom est GOSNAT, il s’agit de préparer les évasions du camp de Châteaubriant. Simone : Combien ?
L’agent de liaison : Onze.
Simone : C’est beaucoup ! Je ne suis pas sûre de trouver 11 planques. ç L’agent de liaison : Bon, alors arrêtons-nous à 7.
Simone : Eugène HENAFF, Fernand GRENIER, Léon MAUVAIS et Henry RAYNAUD vont passer par les planques que j’ai trouvées. GRENIER est resté 3 semaines à Château Thébaud. Mais il y a eu un souci dans l’organisation avec la Région. MICHELS, POULMARCH et TIMBAUD n’ont pas pu s’évader à temps. Ce qui fait que le 22 octobre, quand j’ai su les assassinats… j’étais effondrée.
(Temps… puis elle se reprend).
Les évasions c’est le travail qui m’a le plus plu dans tout ce que j’ai fait, parce que des gars qui sont enfermés … et puis le lendemain ils sont libres, ça c’est épatant !
Voix : Libres ! Pour rejoindre la Résistance et continuer le combat jusqu’au bout…
Voix : Jusqu’au dernier jour !
Simone : Oui ! Jusqu’à la totale libération de la France ! Un coup de sifflet. Trois jeunes entrent en scène avec une échelle. Deux d’entre eux font le guet. Le troisième grimpe sur l’échelle et décroche le drapeau nazi. Puis ils le roulent en boule et partent en courant. Arrive la police à vélo. Elle siffle et les poursuit.
« Le chant des Partisans » Maurice DRUON /Joseph KESSEL/ Anna MARLY
La musique continue sur le texte qui suit.
Voix : Le 2 août 1941, Danièle CASANOVA, 32 ans, crée une organisation de Résistance armée dont elle confie le commandement à Albert OUZOULIAS, 26 ans et à Pierre GEORGES, 22 ans, le futur colonel FABIEN.
En octobre 41, trois Résistants : Spartaco GUISCO 29 ans, Gilbert BRUSTLEIN 22 ans, Marcel BOURDARIAS 17 ans, sont envoyés à Nantes avec mission d’exécuter un officier de l’armée nazie.
Le 18 octobre, le colonel FABIEN vient s’assurer qu’ils sont prêts à agir, ce qu’ils feront le 20 octobre, rue du Roi Albert, près de la cathédrale en abattant le Lieutenant Colonel HOTZ.
Voix : En représailles, Hitler fait fusiller 48 otages : 27 à Châteaubriant – 16 à Nantes et 5 au Mont Valérien près de Paris.
Parmi les 27 de Châteaubriant, 5 sont âgés de moins de 25 ans :
– Maximilien BASTARD, 21 ans « Votre fils chéri et frère qui vous envoie son dernier baiser »
– Guy MOQUET, 17 ans « Vous qui restez, soyez dignes de nous les 27 qui allons mourir ! »
– Charles DELAVACQUERIE ,19 ans, Claude LALET, 21 ans « Vive la vie ! Vive la joie et l’amour. Votre Claude pour toujours ».
– Emile DAVID, 19 ans « Adieu, adieu à tous ». Emile.
– A Nantes, Huit ont moins de 25 ans : Frédéric CREUSÉ, 20 ans « Vive Dieu ! Vive la France ! »
– René CARREL, 25 ans, Maurice ALLANO, 21 ans, Jean-Pierre GLOU, 18 ans « Je pardonne à tous ceux qui m’ont fait quelque tort . Vive la France ! Que la volonté de Dieu soit faite. Votre fils qui vous aime » Jean-Pierre.
– José GIL, 19 ans, Jean GROLLEAU, 21 ans « Adieu chers parents… Vive la France ! Et que Dieu ait mon âme ! »
– Jean LE MOAL, 17 ans, Jean PLATIAU, 20 ans
Celui qui croyait au ciel….
Celui qui n’y croyait pas…
Un rebelle est un rebelle !
Deux sanglots font un seul glas !
« Le Chant des Partisans » reprend quelques mesures et se poursuit en sifflant. Des adolescents entrent et se partagent le poème de Gisèle GUILLEMOT.
Mes camarades
Ils les ont emmenés ce matin
Ils les ont fusillés tout à l’heure…
Ils ne verront plus les pommiers en fleurs
Ne boiront plus le cidre de chez nous
Ils étaient ouvriers, paysans, pêcheurs
Il y avait aussi un instituteur
Dans la journée, des gens très ordinaires
Le soir ils s’en allaient faire la guerre.
On dit qu’on les fusille au creux d’une colline
Ont-ils pu voir traversant les banlieues
Quelques fleurs, un petit coin de ciel bleu ?
J’aurais dû moi aussi m’en aller avec eux
A la même lourde peine nous étions condamnés.
Qui sait combien de temps me sera réservé
Pourrais-je désormais sans cauchemar dormir ?
Devrais-je à chaque aurore les entendre partir ?
Et bientôt regretter que l’on m’ait épargnée ?
Les mois d’août à venir dans le pays normand
Jamais ne retrouveront la douceur d’antan.
Ils les ont emmenés ce matin
Ils les ont fusillés tout à l’heure.
G.GUILLEMOT.
Voix : Et à travers ces heures noires de l’occupation en 42, vous Gisèle, Fernand, Jean, Jacqueline, comment se poursuivent vos Résistances ?
Gisèle : En 42, j’avais 20 ans. Je n’étais pas majeure bien sûr. Ma mère a trouvé un paquet de tracts caché dans le fond du berceau de ma poupée de petite fille. Ça a fait un beau drame. Elle voulait aller trouver la police. Me mettre dans une maison de correction.
Fernand : En 42, j’ai déjà un an et demi de camp derrière moi. Arrêté le 6 septembre 40. Prison de la Santé, camp d’Aincourt avec GRENIER, SCOLARI, HENAFF, POULMARCH, TENINE, SEMAT et les autres. En septembre 41, c’est Rouillé près de Poitiers et en mai 42, le départ pour Compiègne.
Jean : J’ai été arrêté le 16 juillet 41. Prison de la Santé, tribunal spécial. Prison de Fresnes, Centrale de Poissy et en juillet 42, salle des dépôts sous le Palais de Justice. Après ça a été également le camp de Rouillé dans le Poitou pour 15 mois.
Gisèle : J’ai été arrêtée début mars 43 parce que dans le département du Calvados on a fait dérailler deux trains. Il y a eu des victimes. Moi, je portais les messages. J’étais agent de liaison.
Je cachais aussi des explosifs dans mes sacoches.Je mourais de peur parce qu’il y avait des contrôles. Je mettais toujours du beurre, de la viande ou des oeufs dessus.
Fernand : Le 6 juillet 42, on part pour Auschwitz. C’est l’odieux rituel, dans les wagons à bestiaux, la soif, la promiscuité, tout le monde ne peut pas s’asseoir, le manque d’air…A l’arrivée deux jours plus tard, le 8 : les chiens, le tri et les coups de matraque.
Gisèle : J’ai été dénoncée par « Boucle d’or », un copain du groupe qui a parlé ! Je travaillais au ravitaillement général.
Une musique nostalgique joue en contre point…comme décalée.
Entrent des femmes qui portent des caisses de carton. Elles se mettent en activité. Arrivent alors deux types de la Gestapo et un gendarme français. Ils sont accompagnés d’un grand jeune homme blond. La scène est jouée sur le commentaire de Gisèle.
Gisèle : Il a hésité. Il m’a regardée un peu. Il a détourné les yeux et puis finalement il est venu vers moi et il a dit : « C’est elle ! »
La jeune Gisèle : Je ne te connais pas !
Claude – le grand blond : C’est Annick !
Le chef d’atelier : Elle ne s’appelle pas Annick, c’est Gisèle !
Le type de la Gestapo gifle Gisèle qui est projetée à terre.
Gisèle : Le chef m’a giflée. Je n’ai pas perdu connaissance mais j’ai fait semblant d’être évanouie.
Les hommes et le gendarme emmènent la jeune Gisèle. Les autres sortent.
Gisèle : Je ne sais pas pourquoi… C’est une espèce de loyauté envers soi-même…de respect de ses sentiments profonds. Je me sentais terriblement seule.
Voix : Jacky, toi, que deviens-tu en 42 ?
Jacky : J’ai été également arrêtée en 41 pour distribution de tracts contre l’occupant nazi. Bien sûr, j’ai nié. On m’a renvoyée chez moi, mais je me suis bêtement présentée au Juge d’Instruction. Je me suis livrée ! J’ai été condamnée à un an de prison cellulaire à Orléans. [Voix : Et après, libérée ?]. Non, comme j’étais Communiste, j’ai été renvoyée ici à Choisel en janvier 42, pour 4 mois. En mai, c’est le camp d’Aincourt pour 4 mois également. En septembre Gaillon près de Bordeaux, 6 mois. Et en mars 43, le camp de Lalande près de Tours. Le 6 juin, je m’évade. Dans une ferme je mange des flageolets à la crème, (elle rit), ça paraît idiot, comme ça…ce souvenir-là… Je remonte sur Paris et deviens agent du Front National de la Résistance.
Voix : Et tu continues le combat toi aussi, comme le feront immanquablement tous les autres "évadés".
Jean F : L’évasion on en a tous rêvé ! Tellement rêvé ! En novembre 43, je suis transféré à Voves près de Chartres. C’est là qu’en mai 44, va s’organiser la plus grande évasion de la guerre.
Voix : Oui, ils sont 42 à se glisser dans le tunnel de la liberté.
Jean F : Pour moi et les camarades qui sommes restés, départ pour Compiègne : une semaine, puis l’Allemagne et ses camps : NEUENGAMME, WATENSTEDT aux aciéries Hermann Gœring pendant 6 mois, RAVENSBRUCK et la marche vers la baie de LUBECK. Je suis sauvé parce qu’une dysenterie m’oblige à me précipiter dans un fossé. Je n’ai pas été abattu par miracle. Quand je me suis relevé, la colonne était devant, là-bas. J’étais libre ! Libre ! Tu comprends ? Libre ! Je pèse 35 kg mais je suis libre ! J’ai 23 ans.
Fernand : Pour moi, encore un peu de temps avant la liberté…Encore un peu de temps et d’espérance pour le matricule 45472.
Voix : Fernand DEVAUX ! Te souviens-tu de ton nom ?
Fernand : Plus de nom ! Un numéro ! C’est la tentative d’avilissement du IIIe Reich. AUSCHWITZ ! GROSS-ROSEN (Usine Siemens) – HERSBRUCK, de septembre 44 à février 45 ! Et enfin DACHAU en avril, après 16 jours de marche ! Jusqu’au bout les Nazis ont voulu garder leurs proies. Jusqu’au bout ils ont assassiné. Les Américains nous libèrent le 29 avril 45.
Gisèle : Je contemple le camp et je me souviens ! Se souvenir c’est aussi résister ! Si nous survivons, comment pourrons-nous raconter ? Les longs appels meurtriers, le froid polaire… La faim…, Les coups… Les nuits sans sommeil… La crasse… L’odeur, la peur … La mort ! Ce ne sont que des mots, rien que des mots. Alors peut être ferons-nous semblant d’avoir oublié !
« L’affiche rouge » Louis ARAGON/ Léo FERRE
Voix : L’affiche rouge ! Pour les 23 membres du groupe parisien de MISSAK MANOUCHIAN, les FTP MOI (Main d’Oeuvre Immigrée) comptent, en 1942 parmi les groupes de Résistance les plus actifs et les plus déterminés. Notamment parce qu’ils sont en tant qu’Etrangers et Juifs pour beaucoup, directement visés par le régime de Vichy, qui ne leur laisse le choix que de l’internement ou de la clandestinité. A Marseille, c’est la Compagnie MARAT. A Lyon, le groupe Carmagnole Liberté. A Toulouse et sa région, la 35e brigade ! Résistants, Juifs polonais, Juifs hongrois, Espagnols, Arméniens, Italiens, ils forment ce que les Nazis appelleront « L’armée du crime contre la France ».
Un tribunal militaire mi-allemand, mi-français s’installe.
Le juge : Faites entrer les coupables… Tous les coupables ! Des hommes et des femmes entrent, les mains attachées derrière le dos. Ils forment le tableau des accusés du procès des 42. Un tribunal est créé. Pendant l’installation, les voix interviennent.
Voix : Procès au Palais Bourbon. Les 4 – 5 et 6 mars 1942, sept jeunes Résistants sont condamnés à mort.
Procès du 17 juin 1942 pour "l’Affaire de la rue de Buci". Procès des 5 lycéens du lycée Buffon. Pierre BENOIT – Pierre GRELOT - Jacques BAUDRY. Jean-Marie ARTHUS – Lucien LEGROS. Tous condamnés à mort le jeudi 15 octobre 1942, pour avoir été jugés « jeunes gens très dangereux ».
Procès de la Maison de la Chimie. 24 combattants de l’ombre arrêtés par la police de Vichy aussitôt livrés à la Gestapo sont au banc des accusés. Des Chrétiens, des Communistes, des Gaullistes ! Sans distinction, les Autorités allemandes condamnent tout acte de Résistance ! Parmi eux : Marcel BERTOU, 21 ans, Marcel BOURDARIAS, 18 ans, Louis COQUILLET, 21 ans, Maurice TOUATI, 22 ans, Pierre TOURETTE, 25 ans, René TAYER, 20 ans, Georges TONDELIER, 20 ans
Et encore : Karl SCHOENHAAR, 17 ans, Jean LARRE, 23 ans, : Camille DOUVOT, 23 ans, Raymond TARDIF, 21 ans, André AUBOUET, 18 ans, Bernard LAURENT, 20 ans
Procès à grand spectacle. Tout est fait pour terroriser la population, frapper les esprits et disqualifier les Résistants baptisés « Terroristes ».
Voix : Un simulacre de procès a lieu du 15 au 28 janvier 43, à Nantes. Ils sont 45 inculpés Résistants, Français, Républicains Espagnols, Francs Tireurs Partisans, Patriotes. Hommes et Femmes de combat, après avoir été torturés par le SPAC (Service de Police Anti-Communiste du ministre de l’intérieur PUCHEU).
Et voici le réquisitoire du Docteur GOTTLOEB à Nantes : « Il ne s’agit pas de criminels dévoués à une idée, mais bien d’assassins, de bandits organisés, que l’attaque de l’Allemagne contre la Russie rend dangereux. Leurs chefs enrôlent des jeunes gens pour se camoufler en Patriotes afin de ne pas être reconnus comme Communistes. Leur devise est celle de la Terreur, alors que le vrai soldat allemand est entré dans la lutte pour libérer l’Europe et son pays du Communisme. Ils ont mérité la mort !... Ce jugement doit servir à protéger les honnêtes Français. » Tous les accusés du tableau se mettent à chanter la Marseillaise. Le tribunal demande le silence sans succès. Il fuit. La Marseillaise se poursuit à bouche fermée sous le texte qui suit.
Bénédicto BLANCO-SANCHEZ, 25 ans, Albert BREGEON, Eugène LEPARC, Ernesto PIETRO HIDALGO, 24 ans, Maurice JOUAUD, 23 ans, Martin BASILIO BLANCO, Miguel SANCHEZ TOLOSA, 22 ans, Maurice LAGATHU, Félicien THOMAZEAU, Yves BRISSON, 21 ans, Robert DOUINEAU, André GUINOISEAU, Pierre GRELEAU, 20 ans, André ROUAULT, 17 ans.
La Marseillaise est toujours fredonnée. Les personnages sortent. Une femme s’avance, elle lit la fin d’une lettre.
La mère : « Toi, ma chère petite mère, tu sais que tout ce qui est sur la terre doit disparaître. J’aurais voulu te soutenir dans ta vieillesse… …Surtout ma chère petite mère sois courageuse autant que je le suis en ce moment où je vais mourir… Je vais quitter cette terre et j’espère que la jeune génération qui s’élève reprendra le flambeau qui s’est échappé de mes mains, ouvertes par la mort. Ton fils et votre frère qui vous dis adieu pour toujours, oui, toujours. ». Robert DOUILLEZ, 25 ans.
Voix : Le 16 février 1943, toujours plus servile, le Gouvernement de Vichy promulgue une loi créant le S.T.O. (Service de Travail Obligatoire). Sont concernés tous les Français et ressortissants de sexe masculin nés entre le 1er janvier 1920 et le 31 décembre 1922. La durée du S.T.O. est fixée à 2 ans. La France de PETAIN livre la force de sa jeunesse à l’économie allemande.
Voix : Ils ont 21 et 22 ans ! Se cacher dans les fermes et prendre le Maquis devient la seule issue à leur refus de partir. Une nouvelle contribution de la jeunesse à la formation de groupes de Résistance.
A cet instant des hommes viennent se regrouper sur scène dans le cadre du photographe. Arrive devant la scène un paysan avec sa charrette de foin.
Voix : Au cours de l’année 43 et au début 1944, vingt-trois groupes se constituent en Loire Inférieure. Dix huit au nord forment l’ossature du Maquis de Saffré. Les missions de sabotage ont lieu la nuit, ainsi que l’instruction militaire placée sous l’autorité du général AUDIBERT, chef de l’Armée Secrète de l’Ouest. Le paysan croise une patrouille de soldats allemands qui l’arrête.
L’officier allemand : Holà brave homme ! Comment s’appelle ce village ici ? - Le Père BOMME : Ben, c’est le hameau de « La Maillière » - L’officier : (il regarde sur une carte) La Maillière ! Pouvez-vous m’indiquer la direction pour la route d’Abbaretz !
Le Père BOMME : Dame, vous lui tournez le dos, faut repartir à l’opposé…foi de Père Bommé ! L’officier : (circonspect) A l’opposé !... Merci brave homme !
En allemand, l’officier ordonne le demi tour.
Voix : Au Maquis de Saffré, ce 27 juin 44, la ruse du Père Bommé va sauver la vie à 200 jeunes Résistants.
Radio : « LE CANAL DE SUEZ EST EN FEU
Je répète : LE CANAL DE SUEZ EST EN FEU »
Le 6 juin 44, le message venu de Londres donne l’ordre de mobilisation des Maquis. Parachutages d’armes, liaison des Responsables avec les Forces Françaises Libres. Regroupement des unités… Dans la nuit du 16 au 17 juin 44, c’est dans la forêt de Saffré que le rassemblement des divers maquis de l’Ouest s’opère. Le 28 juin vers 5h du matin, c’est l’attaque par plus de 2000 Allemands et miliciens équipés d’armes automatiques et de canons légers. Côté "maquis", 60 hommes seulement sont armés. Issue fatale !
Voix : 9 des 13 maquisards tués au combat ont entre 17 et 24 ans. Le benjamin c’est Robert GEFFRIAUD de Rougé. Le lendemain, 24 des 27 maquisards fusillés à leur tour, à la Bouvardière en St Herblain, ont entre 18 et 24 ans, le benjamin ?... Jacques BIVAUD.
Et le 11 juillet 44 près de la Hunaudière au village de la Brosse à Sion-les-Mines, sur dénonciation, 7 maquisards sont encerclés dans la forêt de Domnaiche. Quatre sont tués : Robert COLLET, 19 ans, Paul LEBORDAIS, 19 ans, Louis DENIEUL et Robert GATINEAU de Châteaubriant, 18 et 23 ans.
Voix : Vers tous les camarades faits prisonniers, déportés et qui ne reviendront pas, que s’envolent aussi nos pensées. A la Résistance, ces enfants, ces hommes ont offert leur jeunesse. Pour notre liberté, ils ont donné leur vie. Mais aucun printemps, aucun matin d’été jamais n’a effacé la mémoire. Jeunes vous étiez ! A jamais jeunes vous resterez !
La musique arrive doucement sur le texte qui suit.
Voix : Enfin comme après l’orage, l’éclaircie de la paix a séché le sang et les larmes. En juillet / août 1944, le concours apporté par les Résistants aux armées alliées est décisif. Il répond à la déclaration du Général de Gaulle du 6 juin 44 au micro de Radio Londres : « Pour les fils de France, où qu’ils soient, quels qu’ils soient, le devoir simple et sacré est de combattre par tous les moyens dont ils disposent ».
Voix : Et ils sont là tous les Résistants de la première heure, et les jeunes Communistes, ceux de la colonne Fabien et ceux de l’état-major Rol Tanguy. Ceux des Jeunesses Ouvrières et Etudiantes Chrétiennes. Les Forces Unies de la Jeunesse Patriotique. La Jeunesse Agricole Catholique, et l’Union de la Jeunesse Juive. Et encore les Mouvements de Jeunesse Protestants.
Tous apportent leur aide, leur engagement, leur concours à la grande œuvre de la Libération de Paris et de la France.
Adolescente : Comment pourrions-nous aujourd’hui, oublier ? Votre Résistance d’hier est notre combat d’aujourd’hui dans la vigilance salutaire d’un monde écartelé entre ces « Droits des Hommes » bafoués, dont nous fêtons cette année le 60e anniversaire… et la lutte quotidienne pour l’espérance d’une Humanité plus fraternelle.
La musique monte un peu. Elle va rester sous les textes des « Droits de l’Homme » dits par les enfants qui s’avancent.
Un instituteur et une institutrice annoncent les articles.
Instituteur : Article 3 - Enfant : Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne.
Institutrice : Article 5 - Enfant : Nul ne sera soumis à la torture ni à des peines ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Instituteur : Article 9 - Enfant : Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ni exilé.
Institutrice : Article 13 - Enfant : 1) Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat. Enfant : 2) Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien et de revenir dans son pays.
Instituteur : Article 15 - Enfant : Tout individu a droit à une nationalité.
Institutrice : Article 22 - Enfant : Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la Sécurité Sociale.
Instituteur : Article 23
Enfant : Toute personne a droit au travail
Enfant : Au libre choix de son travail
Enfant : A des conditions équitables et satisfaisantes de travail.
Enfant : Et à la protection contre le chômage.
Enfant : Tous ont droit, sans aucune discrimination, à un salaire égal pour un travail égal.
La musique s’arrête un instant. Puis c’est l’introduction de « L’Âge d’Or ». Pendant la proclamation de ces « droits », les acteurs et actrices sont tous revenus sur scène derrière les enfants pour constituer le dernier tableau et chanter :
« L’ÂGE D’OR » de Léo FERRE
Evocation écrite et mise en scène par Alexis CHEVALIER. Assistanat : Christine MAEREL. Administration : Céline JOUVET. Une réalisation artistique du THEATRE MESSIDOR
Avec la participation du groupe Les Conkiska’dors et de Dany Coutand et d’une centaine de comédiens amateurs, jeunes et adultes, de la région de Châteaubriant.
Evocation écrite et mise en scène par Alexis CHEVALIER Assistanat : Christine MAEREL Administration : Céline JOUVET Une réalisation artistique du THEATRE MESSIDOR
Avec la participation du groupe Les Conkiska’dors :
Camille URVOY (chant)
Fabien CHIRON (guitare)
Nicolas MONNET (trompette, piano)
Romain PLANQUETTE (accordéon)
Jean-Charles CLAVIER et Gildas LESAGE (percussions)
Alexandre AMOSSE (basse)
et la participation de Dany COUTAND (chant – guitare)
Interprétation du spectacle par une centaine de comédiens et comédiennes amateurs du Pays de Châteaubriant parmi lesquels : des élèves de l’école élémentaire « René Guy Cadou », des collégiens de la Ville-aux-Roses et des jeunes des lycées Guy Môquet et Etienne Lenoir.
Le défilé a été réalisé avec le concours d’une centaine d’enfants et de leurs enseignants des écoles primaires du Castelbriantais.
Communication, graphisme : Jacques VERMEERSCH
Régie générale : Michel CAHOUS
Lumière et son : EUROLIVE
Remerciements :
A tous les membres de la Commission Culture de l’Amicale de Châteaubriant-Voves-Rouillé.
Aux Instituteurs et Professeurs impliqués auprès de leurs élèves. A Odette NILES, Jacqueline TIMBAUD, Fernand DEVAUX, Jean FUMOLEAU, Jacqueline FOURRE, Gisèle GUILLEMOT, Carlos FERNANDEZ, Jean-Claude BARON, Joël BUSSON, Jean-Louis GOURAUD, Georges BOUDET, Joseph DURAND, André LEPARROUX et à toutes celles et tous ceux qui ont apporté leur contribution à cet écrit et à la réalisation de l’évocation artistique.